La pêche du loup en étang littoral
Le littoral méditerranéen est jalonné d’étangs appelés aussi lagunes. Ces étendues d’eau peuvent communiquer avec la mer par le biais de graus ou de canaux. Grâce à leur situation à l’interface terre-mer, les étangs présentent une grande richesse écologique. Les poissons migrent dans ces eaux et aiment y passer le semestre estival. C’est dicentrarchus labrax (le bar, appelé loup au bord de la grande bleue), qui est l’espèce recherchée par les pêcheurs aux leurres. La profondeur des étangs est généralement peu importante (entre 1 et 2 mètres en moyenne). Ils sont donc le terrain de jeux rêvé des pêches de surface ou peu profondes. Vous aimez voir vos stickbaits disparaître dans une énorme gerbe ? Vous aimerez la pêche en étang littoral !
S’il y a un leurre de surface qui sait déclencher des attaques spectaculaires lorsque l’on arpente ces lagunes, c’est bien le Chihuahua 110. Il est simple d’emploi, se lance comme un missile même face au vent, a un système sonore performant et passe aisément dans les vagues (contrairement à beaucoup de ses homologues). Capable de réaliser un walking the dog très ample, il est largement au-dessus du lot. C’est une vraie référence, un incontournable de la pêche du loup et du bar auquel je dois mes plus belles prises. 11 cm – 21 g – Flottant
Quand les conditions sont difficiles, que les labrax hésitent à monter sur les leurres de surface traditionnels ou s’ils tapent à côté, le Jackson Debu Nyoro 85 entre en scène. Ce pencil silencieux coule lentement à l’arrêt en roulant sur lui-même. Il exécute un parfait « walking the dog » qu’envient ses congénères coulants bien souvent beaucoup moins maniables. En récupération linéaire, sa nage en «S» est originale et peut décider les poissons récalcitrants. Pour ne rien gâcher, il se lance à longue distance. Ces capacités extraordinaires en font un leurre très performant. 8,5 cm – 13 gr – Slow Sinking
Lorsque la végétation aquatique est trop présente ou quand les loups refusent les leurres durs, il est nécessaire de monter un leurre souple. Pour éviter d’accrocher des algues et rendre son subterfuge inopérant, le soft sera fixé sur un hameçon texan.
Le Shad Impact de Keitech est un fabuleux piège à poissons. Tous les carnassiers y succombent et le loup ne déroge pas à la règle. Le dos du shad est composé d’un plastique flottant alors que le ventre est constitué d’une matière plus dense contenant du sel. Cette combinaison lui confère un équilibre parfait. Il se tient droit en position horizontale permanente et dodeline sur lui-même lors de la descente (rolling). Sur twitch, il réalise de brusques écarts imitant un poisson en panique. Il accepte des récupérations très lentes, qui sont parfois déterminantes sur les poissons apathiques. Le pêcheur peut le customiser en lui ajoutant des inserts au niveau de la base du leurre pour le faire couler plus rapidement et augmenter l’effet rolling lorsqu’il gagne les profondeurs. Disponible en 3’ (7,6 cm), 4’ (10,1 cm) et 5’ (12,6 cm) ; j’utilise essentiellement la plus grande taille.
Le Keitech Sexy Impact bénéficie lui aussi de la même technologie combinant deux plastiques de densités différentes. Il se démarque du Shad Impact par son wobbling (lors de la récupération, il ondule de gauche à droite sur un plan horizontal) et par l’action de sa queue très fine est très subtile. Le 1/3 arrière du leurre est mobile et donne l’impression d’un mouvement perpétuel. Le Sexy Impact se travaille par twichs entre deux eaux où sur le fond. Comme tous les Keitech, il contient des arômes naturels de calamar et les coloris sont magnifiques. 2,8’ 7.1 cm – 3,8’ 9.6 cm – 4,8’ 12.2 cm – 5,8’ 14,7 cm
Les shads à paddle font aussi leur part de loups. Les lagunes étant faiblement profondes, il est indispensable que le shad évolue en weightless ou très faiblement plombé en restant stable et sans tourner sur lui-même. Parfaitement équilibrés, les Keitech Swing Impact et Easy Shiner répondent à merveille à ce cahier des charges.
Actuellement les pêches en buzzing sont à la mode (le leurre est ramené sur la pellicule de l’eau en faisant du bruit et en créant un sillage de bulles). Cette technique, que nos aînés connaissaient bien avant nous (ils pratiquaient surtout avec de gros twists), prend du poisson, c’est certain. Elle est d’une grande simplicité et permet de prospecter rapidement toutes les zones, mêmes celles riches en végétation flottante. Mais certains ne pratiquent quasiment plus qu’avec des shads ramenés rapidement à la surface. En se cantonnant à cette technique et en ne cherchant pas à s’adapter à l’humeur du poisson, ils se privent de nombreuses touches. La pêche en buzzing est une arme parmi tant d’autres. Et lorsqu’il faut la sortir, je dégaine souvent un TT Shad de Bait Breath. Il se lance bien grâce à grande densité et fait un son que les loups aiment beaucoup.
Cette sélection de leurres, tous complémentaires, propose de vastes possibilités. Elle permet de mettre un maximum de chances du côté du pêcheur pour répondre efficacement aux attentes des prédateurs des lagunes et cela quelques soient les conditions et le secteur pêché.
Pour propulser ces petites merveilles, une canne de longueur comprise entre 2,10 m et 2,40 m (entre 7 et 8 pieds) est recommandée. Il ne sert absolument à rien, dans ces milieux ouverts où les obstacles sont rares et les vagues peu importantes, d’utiliser un blank de plus de 8 pieds. Cela n’a que des inconvénients. D’ailleurs, je pense même que 8 pieds est trop long et préfère un ensemble autour de 7’5 (2,25 m). Au-delà, la canne est moins maniable, l’ensemble plus encombrant… et lorsque l’on anime parfois des stickbaits toute la journée, un ensemble léger et bien équilibré est indispensable. L’action ne devra pas être trop raide mais plutôt progressive. Aussi, la puissance doit se situer dans les 7-28 grammes, parfois même plus en cas de conditions « musclées ». Elle doit impérativement être supérieure à 21 grammes pour permettre de lancer aisément un Chihuahua lorsqu’il y a du vent. Et il y a souvent du vent au bord de la Méditerranée.
Le moulinet doit équilibrer l’ensemble. Préférez un modèle robuste qui tolère bien l’eau salée, avec un frein progressif et une récupération moyenne à élevée. C’est tout ce qu’on lui demandera. Il devra être rempli de tresse d’un diamètre allant de 0.8 à 1.2 PE, soit environ 15 centièmes. Petite parenthèse : les 15 centièmes japonais (PE 0.8) n’ont rien à voir avec les 15 centièmes « français » qu’affichent certaines marques et qui sont beaucoup plus gros… J’utilise de la Varivas Avani SeaBass Max Power et de la Varivas Super 8 PE. Elle sont fines, résistantes et atteignent des distances de lancés remarquables. Certains de mes amis utilisent de la HighGrade PE en PE0.8 et PE1 et en en sont ravis. Le bas de ligne est constitué de 1,5 m de fluorocarbone en 12 lbs (autour 28 centièmes). Les Dead or Alive de Gran Nogales et le Seabass Shock Leader de Varivas ont ma préférence.
Les postes à prospecter en priorité sont les anses, pointes, chenaux, cassures… tout ce qui peut rompre la monotonie d’une topographie souvent trop rectiligne. Les arrivées d’eau, les herbiers ou les piquets plantés sont aussi des zones à pêcher de préférence. Dans les canaux, les contre-courants et les berges creuses sont souvent les tenues des labrax.
Il faut privilégier les journées venteuses mais les coups du matin et du soir peuvent être productifs même par calme plat. Certains pêchent la nuit, moi je dors.
La pêche du loup dans les étangs littoraux est une pratique passionnante mais parfois déroutante pour les débutants… et même pour les plus confirmés. Si vous désirez vous initier sur ce terrain singulier, vous avez, avec ces quelques conseils, une bonne base pour débuter. Maintenant à vous de vous faire votre propre expérience en défiant sieur labrax sur les berges des lagunes.
Je voudrais rajouter une dernière chose : Les loups d’étangs ont bien souvent un goût de vase fortement prononcé… surtout s’ils sont depuis longtemps dans la lagune (on peut considérer que plus le sujet est vert foncé plus il est ancien dans l’étang). Donc, à moins que vous soyez friand de cette saveur si peu délicate, vous pouvez en relâcher un maximum.
Aussi, du fait que les étangs littoraux ne communiquent que peu avec la mer, le phénomène de sédimentation y est très important. Si l’accumulation (et la détérioration) de débris végétaux est tout à fait naturelle, toutes les saletés que l’homme balance sur les rives et les bassins versants des lagunes depuis des centaines d’années s’y retrouvent aussi. Entre les pesticides agricoles liés notamment au traitement intensif de la vigne, les rejets industriels ou urbains, les arrivées d’eau de certains canaux répugnants (canal de la Robine par exemple)… la liste des maux est longue. Les agents polluants s’y sont accumulés sans pouvoir se dissoudre aussi facilement qu’en mer. Ainsi, les concentrations de métaux lourds et de plein d’autres choses peu appétissantes sont plus importantes dans la faune peuplant les étangs. De récentes études ont montré que les anguilles mourraient d’hépatites (leurs foies explosent) du fait de teneurs en cuivre et cadium trop importantes (merci bouillie bordelaise et autres traitements intensifs de la vigne…). Et tout cela se retrouve au bout de la chaîne alimentaire dans les chairs du prédateur qu’est le loup. Donc si vous voulez que vous et vos proches viviez vieux et en bonne santé, il vaudrait peut-être mieux y réfléchir à deux fois avant de consommer régulièrement ce genre de poisson. Je suis sûr qu’après une petite explication, votre grand-mère vous pardonnera de ne plus lui ramener de loup d’étang 😉